Je ne sais pas ce qui m’a pris, mais lorsque j’ai vu Ilkan, en compagnie de cette jeune femme, je n’ai pu m’empêcher de lancer ma petite enquête. Est-ce que c’était de la jalousie que je ressentais? De l’inquiétude? Peut-être un mélange des deux… Le courant semblait bien passer entre les deux, et je ne savais mettre les mots sur ce que ça m’avait fait. Après tout, nous n’étions plus ensemble depuis des mois, il avait bien le droit de fréquenter qui il voulait, non? J’ai voulu chasser cette idée de ma tête, mais j’en étais incapable. Au bout de quelques jours, des réponses ont commencés à se former. J’ai su son nom, puis ce qu’elle faisait dans la vie. De là, j’ai pu trouver le reste des informations, par moi-même. La jeune femme semblait sans histoire, jusqu’au moment où j’ai trouvé que ses parents avaient été assassinés devant elle, puis avait été séquestrée, battue, violée par les meurtriers de ces parents, et ce, pendant plusieurs mois. Tout d’un coup, je regrettais d’avoir pousser mes recherches. La pauvre! Elle a probablement vécu un enfer…

Plusieurs semaines se sont écoulées depuis, et j’avais sagement mis cette histoire de côté. J’avais beaucoup de dossiers pour m’occuper l’esprit, me concentrant sur ces derniers, et lorsque je rentrais à la maison, je préférais me concentrer sur ma famille, mes enfants, plutôt que sur la vie amoureuse de mon ex-mari. Ce matin-là, comme je n’avais pas de rencontre, ni même de séances à la cour, j’en ai profité pour faire de la paperasse. Il était un peu plus de dix heures, lorsque mon assistante m’a téléphoné pour savoir si j’avais du temps pour voir une jeune femme, qui voulait me rencontrer. J’ai acquiescé et j’ai invité mon assistante à la faire passer dans mon bureau.

Parfois, le destin avait une drôle de façon de réagir. Des semaines s’étaient écoulées depuis que j’avais délaissé mes recherches sur la jeune femme, qu’Ilkan semblait fréquenté. Et sans crier gare, elle débarque à mon bureau, prenant un rendez-vous avec moi. J’imaginais qu’elle avait besoin de conseil personnel… C’est ce que j’espérais, en tous cas. Je ne voulais pas être demasqué, et passer pour l’ex-femme, folle, qui fait des enquêtes sur les nouvelles conquêtes de son ex-mari. À vrai dire, je n’avais encore aucune idée de ce qui m’avait pris de faire une telle chose… Mais bon, que voulez-vous? Ce qui était fait, était fait… Et si je devais répondre de mes actes, je le ferai. « Maître Roxburgh ? Bonjour. Erika Clarke. Nous avions rendez-vous. » Installer derrière mon bureau, en position assise, je m’étais relevée à l’entrée de la jeune femme dans mon bureau. Un léger sourire s’était dessiné sur mon visage. « Bonjour Mlle Clarke! » La saluais-je à mon tour. C’était la première fois que je la rencontrais, et même si mes recherches dormaient depuis plusieurs semaines, je n’ai pu m’empêcher de penser à tout ce que j’avais découvert sur elle. « Vous pouvez vous asseoir. » L’invitais-je, d’un geste de la main sur l’une des deux chaises devant mon bureau. Je l’ai imité. J’ai pris les dossiers sur lesquels je travaillais avant qu’elle n’arrive, et je les ai déplacés sur le côté, prenant une tablette pour prendre le plus de notes. J’ai inscrit la date et son nom, avant de relever les yeux vers elle. « En quoi puis-je vous être utile aujourd’hui? » Lui demandais-je, un sourire, toujours présent sur mon visage, mais cette fois-ci, il était rempli de compassion. Je ne savais toujours pas le sujet principal de cette rencontre, mais ce n’était pas première cliente que je rencontrais depuis le début de ma carrière, et même si parfois, ce n’était rien de bien grave, parfois, c’était tout le contraire.

En l’apercevant à la porte de mon bureau, je n’ai pu m’empêcher de repenser à toutes ces informations que j’avais trouvé sur elle. C’était tout une surprise de la voir, mais je ne pouvais laisser ma vie personnelle prendre le dessus. Mlle Clarke était probablement venue me rencontrer pour autre chose que ça…. De toute façon, elle n’était pas au courant de ma petite enquête sur elle. L’invitant à s’asseoir, j’ai fait de même, rentrant immédiatement dans le vif du sujet. Un stylo à la main, je comptais prendre des notes sur cette rencontre, comme je faisais à l’habitude, avec tous mes clients. « Voilà. J’ai eu un très gros contentieux avec mon colocataire, qui s’avère être une personne que je connais depuis très longtemps. Le bail est à un mon nom. J’ai essayé de le faire partir de la manière la plus pacifique qu’il soit, laissant à ma charge toute la paperasse à gérer. L’ennui c’est qu’il refuse de plier bagage. Ses affaires sont toujours à l’appartement. Ce qui veut dire, qu’il occupe toujours les lieux. Pour des raisons personnelles, je refuse d’y vivre tant qu’il ne sera pas parti. Vous comprenez à quel point la situation est compliquée. » Elle marque une pause, avant de reprendre la parole. « Aidez-moi à me débarrasser de lui… s’il vous plait. » J’ai froncé les sourcils, un instant. Je n’étais pas certaine de savoir comment l’aider, à l’exception d’un truc, mais ce n’était quelque chose à prendre à la légère. « Mlle Clarke. La seule option que je peux voir, c’est de porter plainte contre votre colocataire et peut-être de faire les démarches pour avoir une injonction contre lui, mais c’est un peu poussé comme démarche, surtout dans ce cas. Je ne sais pas comment je pourrais vous être utile? » Lui dis-je, en toute honnêteté. « Puis-je vous demander qui vous a référez à moi? » Lui demandais-je. J’étais curieuse de savoir qui était la personne qui lui avait donné mon nom.