feat Tobias

Le retour du beau temps avait un effet très vivifiant sur moi. On dit souvent que les hommes constataient son retour au nombre de jupettes qu'ils pouvaient croiser dans la rue. Mais pour nous les femmes, c'était juste un plaisir de pouvoir les enfiler de nouveau et coloré nos longues jambes d'un hâle chocolaté. Le retour du beau temps signifiait également de plus longue journée et de plus longue soirée passé à la lumière du soleil et le retour de cette petite brise délicate et tiède qui venait caressait notre peau. Au fond, j'aimais cette période de l'année parce qu'elle me donnait une sensation de légèreté.

Pour tant, après une longue journée passé au laboratoire, j'avais décidé de troquer la légèreté du printemps pour la lourdeur et la moiteur d'une piste de danse. Je n'arrivais plus à me souvenir de la dernière fois que j'avais mis les pieds dans cette boite de nuit. J'avais l'impression d'être une vieille parmi tellement de jeune, que je me demandais si j'y avais encore ma place et pourtant, je n'avais nullement envie d'être ailleurs. Au fond, je n'étais clairement pas là pour draguer. C'était la seule idée de pouvoir danser toute la nuit et boire quelques verres, en toute insouciance, qui m'avait incité à franchir à nouveau les portes du Dragonfly.

Après avoir passé de nombreuses minutes à me déhancher sur la piste et avoir commandé au bar, je m'installais à une petite table libre dans un coin de la salle. J'étais essoufflé et pourtant, je ne pouvais pas être plus en forme et plus excité qu'à cet instant précis. J'avais le sourire bien accroché à mon visage et les yeux pétillant de satisfaction et de joie.

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Mon regard se promenait à travers la boite de nuit. Je me demandais, si j'allais y voir quelques visages familiers. Le dragonfly avait longtemps été mon sanctuaire pour les soirées chaudes de Los Angeles. J'y avais bien des souvenirs et quelques-uns en bonne compagnie. Mais en dehors du gérant que je connaissais assez bien, ce soir, il n'y avait aucune tête que je connaissais, mais peut-être que c'était pas plus mal au final. Cette soirée m'était totalement réservé, je devenais ma seule priorité.

Je profitais de ce petit moment de répit, pour profiter de la fraîcheur de mon Daikiri. Cette sensation glaciale, qui parcourait mon corps et me redonnait une bonne dose de peps, était clairement délicieuse. J'en savourais la moindre gorgée, tout en continuant de regarder les plus ou moins bon danseur et les plus ou moins bon dragueur. Certains n'avaient clairement pas le rythme dans la peau, ce qui donnait rendait la scène plutôt amusante à regarder et il en était de même pour ceux qui préférait se contenter de draguer.

Mais, mon attention se reporta très rapidement sur un tête à tête non prématuré entre un danseur et un autre jeune homme. J'eus à peine le temps de poser mon verre et de mettre une main devant moi pour le retenir dans sa chute, que l'impact avait lieu. Je me surpris à en rigoler alors que le jeune homme semblait, quant à lui, gêné et inquiet de la situation et de m'avoir fait mal. "Non, ne vous inquiétez pas, je sors indemne de votre maladresse." Je souriais amusé par la situation et lui fis une confession. "Je vous ai vu arrivé, alors j'ai eu le temps de sauver mon verre et mes pieds. Et vous ? Vous ne vous êtes pas fait mal, j'espère ?" Je l'observais prise d'une soudaine inquiétude à son égard.

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Je n'avais pas laissé le jeune homme s'inquiéter très longtemps, il n'y avait aucun intérêt à ça puisqu'il ne m'avait fait absolument aucun mal. Je m'amusais en revanche à me moquer de sa maladresse, ce qui lui décrocha un petit sourire qui fit plaisir à voir. Il m'indiqua alors l'origine exceptionnelle de sa maladresse et je penchais la tête pour prendre connaissance de l'individu qui l'avait envoyé tout droit sur moi. À en voir l'état dans lequel était l'individu, toute personne qui le croiserait n'aurait probablement aucune chance de s'en sortir indemne. "Je vois ... Un piètre danseur qui ne semble pas non plus très bien tenir l'alcool. Vous n'aviez aucune chance." Dis-je en ramenant mon regard vers le siens, toujours autant amuser de la situation. Mais mon amusement s'arrêta rapidement lorsque je réalisais que j'avais omis de lui demander à son tour s'il ne s'était pas fait mal, après tout, c'était lui qui venait de se faire bousculer. "Tant mieux alors. Cela aurait été dommage de devoir écourter si vite votre soirée".

Il se redressa finalement et j'en profitais pour attraper mon verre et prendre une nouvelle gorgée de mon cocktail. Je me stoppais et avalais rapidement le liquide glacial dans ma bouche, lorsqu'il s'adressa de nouveau à moi pour se présenter. Sa façon, de le faire, m'amusa de plus bel et je me surpris à lui rendre son immense sourire. "Enchanté Tobias. Moi, c'est Ellen et vous ne me dérangez pas si c'est ce qui vous fait peur." Contrairement à ce qu'il s'imaginait, je ne m'en moquais pas. Il semblait très sympa et contrairement à d'autres, il avait eu la politesse de s'excuser, ce que bien nombre de personnes n'aurait probablement pas fait. "Vous voulez vous asseoir avec moi ?" Lui demandais-je après un petit instant d'hésitation. "A moins que vous soyez venu accompagner et que vous soyez très attendu ?" Un peu de compagnie ne me ferait pas de mal et j'appréciais toujours me faire de nouvelle connaissance.

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Le feeling semblait assez bien passé entre le jeune homme et moi. Quelques secondes ne suffiraient probablement pas à s’en assurer, mais dans tous les cas, il semblait facile de rire et de sourire en sa compagnie. Le ton était posé, les éclats de rire sincères et francs. Ça faisait un bien fou, quand on réalisait que ça devenait parfois difficile de décrocher un sourire à quelqu’un de nos jours. Sur toutes les personnes que vous croisez dans une journée, combien vous disent bonjour ? Combien vous offre un sourire ? Combien même vous décroche un regard ?

Mon regard avait rapidement rejoint le siens, je n’avais pas l’intention de m’attarder sur ce danseur ivre qui ne faisait pas attention à ce qu’il faisait et je souriais acquiesçant aux paroles de l’inconnu devant moi, quant au fait qu’il n’aurait eu aucune chance quoiqu’il arrive. « Probablement ».

Je m’étais alors finalement concentré sur lui, réalisant que je ne lui avais pas demandé s'il allait bien. Il me rassura très vite et je fus ravi de cette nouvelle. Il aurait été malheureux de devoir écourter une soirée, parce qu’elle commençait à peine ! Du moins pour moi. J’ignorais depuis combien de temps, en revanche ce que je découvrais, c’est qu’il ne semblait pas vraiment se réjouir à l’idée d’être ici. Je le regardais à la fois surprise et amusé. « Je ne comprend pas comment vous pourriez préférer une soirée tranquille chez vous, alors que vous pourriez vous faire bousculer par des personnes ivres toute la soirée ! Vraiment ... je ne comprend pas.  » Mon visage sérieux, laissa rapidement apparaitre un sourire en coin avant de rire à ma propre marque d'ironie.

Sachant qu’il était attendu, je me décidais à ne pas le retenir trop longtemps, mais il se présenta à moi. C’était sympa de pouvoir mettre un prénom sur son joli minois. Évidemment, je fis de même et après un instant de réflexion, m’imaginant déjà devant un refus, je lui proposais tout de même de s’asseoir avec moi. À ma grande surprise, il accepta. « C’est très gentil, mais qu’est ce qui vous fait croire que je ne vais pas en profiter pour vous draguer ? » Je ne le quittais pas des yeux, le regard pétillant d’amusement et de malice.

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De par son rire entraînant, je m’associais à lui. Quoi de mieux qu’une ribambelle d’ivrognes pour passer une excellente soirée. Même une meute de beau garçon ne leur arriverait probablement pas à la cheville. J’excellais évidemment dans l’art de l’ironie, et heureusement pour moi, je n’avais pas encore été confronté à ce problème. Je savais que plus la soirée avancerait plus je m’approcherais du risque d’être emmerdé par un homme complètement désinhibé qui se sentirais soudainement poussé des ailes. Une petite part de moi espérait être partie avant que ça n’arrive.

Après m’avoir sondé -et oui je l’avais remarqué- probablement pour savoir si j’étais une personne digne de confiance, il s’installa finalement face à moi. Il préférait une soirée calme à une soirée drague et je m’amusais en lui demandant ce qui pouvais bien lui faire croire que je n’allais pas en profiter pour le draguer moi aussi. Je haussais un sourcil et mon visage se fit soudainement plus malicieux, alors que sa réponse était empreinte d’un petit air de défis. « Vous devriez faire attention à ce que vous dite M Le tombeur. Mettre une femme au défi peut s’avérer très dangereux ». J’en étais déjà à lui donner un petit surnom. Un surnom finalement très approprié à la circonstance si on y réfléchissait bien.

Pourquoi je me retrouvais seule assise dans ce bar, voilà la question que Tobias me posa. Je pris un petit moment pour y réfléchir. La réponse n’était, en soit, pas très compliqué, mais il vrai que je n’avais pas vraiment pris la peine de proposer une soirée à mes meilleurs amis. Peut-être parce que parmi eux, j’étais la seule qui n’avait à ce jour aucune obligation familiale. Peut-être parce que j’avais eu simplement envie de prendre un moment rien que pour moi. Un moment sans pression, sans attente, juste avec l’envie de faire ce que j’aimais le plus au monde, danser à ne plus me sentir capable de marcher. « Personne ne m’a abandonnée et je n’ai abandonné personne moi ! » J’avais insisté sur le ‘moi’ avec un brin d’humour et un sourire moqueur, parce qu’il avait tout autant conscience que moi qu’il n’avait pas été lâché par ses potes, mais qu’il était bien celui qui les avait laissé, mais je ne m’en plaignais pas le moins du monde puisqu’il l’avait fait pour moi. « J’avais juste envie d’une soirée rien qu’à moi accompagné d’un bon petit verre et d’une piste de danse. » Avais-je repris pour finalement répondre à sa question. « Et toi alors ? Pourquoi avoir cédé à tes amis ? Tu ne sembles vraiment pas à fan de ce genre d’endroit ! ».Il n’avait pas cessé de dire qu’il avait été traîné de force ici, alors qu’il aspirait à une soirée tranquille, alors ce n’était pas très difficile d’en arriver à la conclusion que ce n’était pas son délire.