interagi avec @...

Depuis le départ de Jaimie dans cet internat, les journées de Sanaa étaient horriblement longues. Jaimie lui manquait énormément. La maison semblait tellement vide et sans vie sans lui. C’était davantage le cas, les jours où Lily était chez sa mère. La brunette se sentait horriblement seule et elle détestait cela. Elle se sentait encore une fois comme étant gamine, abandonnée. La demoiselle Keagan tentait de rester le plus possible en activité. Elle avait besoin d’avoir l’esprit occupé pour pas que d’autres pensées plus sombres, plus néfastes viennent la hanter et la tenter. Sanaa ne voulait pas laisser son addiction prendre une nouvelle fois le dessus. Pas cette fois, c'était à son tour d'être la plus forte.

Sanaa avait entendu dire que la ville organisait un concert pour les victimes de l’explosion du centre commercial. Sanaa en faisait en quelque sorte partie, elle avait été impactée par ce tragique événement. Sa boutique avait été endommagée par le souffle de l’explosion, elle avait été blessée. Mais tout cela n’avait pas la moindre importance. Tout cela était réparable. Le plus important et le plus grave dans tout ça ; c'était que son fils avait été pris au piège à l'intérieur. Pendant de nombreuses heures, la crainte et l'angoisse avaient envahi Sanaa. Un événement qui avait affecté Jaimie, mais s’il n’en parlait jamais.

Sanaa avait décidé de se rendre à ce concert. Elle ferait également un don pour les personnes qui n’avaient pas eu la même chance qu’elle. La chance de retrouver un proche vivant et pouvoir le serrer dans ses bras. C’était aussi pour la brunette une bonne façon d’occuper sa soirée. Elle pourrait se détendre et échapper à sa solitude, surtout en ce jour de Saint Valentin. La demoiselle Keagan se trouvait un peu à l’écart de la foule. Elle se déhanchait et elle bougeait au rythme de la musique. Une musique qui était festive et entrainante. Elle se vidait tout simplement la tête.

Ma présence à ce concert est hautement improbable et pourtant, j'y suis. Pourquoi c’est si improbable ? D'abord, parce que ce genre de piscine de foule est loin d'être ma tasse de thé. Ensuite, parce que les concerts ne le sont pas non plus. Et pour couronner le tout, il s'agit de la Saint-Valentin. Non pas que cet événement me dépite : il m’indiffère plutôt. Je crois que je n’ai jamais fêté de Saint-Valentin. Probablement parce que je n’ai jamais eu de relation le permettant. Est-ce que ça me manque ? Pour être honnête, je ne m’en suis jamais soucié. Je vis très bien avec. Ou plutôt sans. Je crois que mon expérience la plus marquante sur ce plan reste un baiser volé à l’école élémentaire. La fille en question m’avait offert une carte de Saint-Valentin et un bisou. J’étais resté sidéré et j’ai passé le reste de ma scolarité à l’éviter soigneusement.

Alors qu’est-ce que je peux bien faire ici, hein ? La raison est pourtant très simple : je baisse les yeux sur mon uniforme de secouriste : une chemise bleue marine à manches courtes assortie à un pantalon de même couleur. Sur mon épaule, une croix agrémentée d’un caducée est brodée. Je réajuste machinalement le talkie-walkie à ma poche pectorale, comme pour vérifier qu’il fonctionne bien, ainsi que mon oreillette. Il y a tellement de bruits et la musique est si forte que je dois être certain que la radio fonctionne correctement et que le volume est suffisant.

J’esquisse un très bref sourire poli et un signe de tête à ma collègue qui me fait signe, sur la piste de danse. Elle n’est pas de service, ce soir. Elle devait l’être mais, j’ai échangé mon jour de congé avec elle pour qu’elle puisse profiter de ce concert avec son fiancé. Ce jour a plus de sens pour elle que pour moi, de toute évidence. Alors, ça ne me dérange pas.

Je suis plutôt arrangeant, et puis, après ma longue période de convalescence, ça m’a fait du bien de reprendre le boulot, cet hiver. Pour que cette soirée se passe bien, la ville a déployé de nombreux moyen pour que tous se sentent en sécurité : policiers, pompiers et équipes médicales.

Voilà la raison de ma présence ici. Et c’est assez étrange, quand on y pense, que toute trace de phobie sociale disparaisse quand je porte cet uniforme. Vigilant et très professionnel, mon regard glisse sur la foule, alors que je me tiens prêt à intervenir, avec l’air le plus sérieux du monde ancré sur le visage. De temps en temps, je m’occupe de quelques malaises, je ne réalise pas tout de suite que certains d’entre eux sont simplement un moyen de passer entre les mains…  

A Valentine’s concert

Lilly & members

«Chasser le mal par le mal»

Je regarde à nouveau mon reflet dans le miroir. Les souvenirs sortent du placard. Finalement, elle est toujours là. Elle fera toujours parti inhérente de moi, cette fille de Bâton-Rouge, celle que je cache, celle qui blesse, qui boit, qui fait sans cesse les mauvais choix. Ce soir, j’ai besoin d’elle, besoin d’un break, d’une petite parenthèse. Les filles ont insisté pour que nous allions au concert sur Venice Beach organisé en hommage aux victimes d’Abbot Kinney Boulevard. Ce n’est pas le genre de soirées que j’affectionne particulièrement mais la solitude est devenue très pesante ces dernières semaines. Wyatt et Cordélia sont très pris par le travail, Willow a le nez plongé dans les révisions tandis que Doyle…(soupire intérieur) et bien Doyle…il n’y a rien dire en fait. Oui rien. Le Néant total. Et pourtant, ce n’est pas l’impression que j’ai eu au début. Mais il faut croire que je me suis trompée. A vrai dire, je me sens vraiment stupide. Je me suis immiscée dans sa vie comme un parasite en espérant que…(soupire). Et puis, je me suis surprise à l’affectionner bien plus que je ne le devrais. Je ne sais pas pourquoi lui, ni comment. Je n’arrive pas à l’expliquer. C’est…lui tout simplement. Sa douceur. Son regard. Sa délicatesse. Ses iris ambrés. Sa gentillesse…et je pourrais en citer bien d’autres. Malheureusement, j’ignore ce qui s’est passé, mais depuis des mois, il n'est plus très loquace et se montre distant. Le temps que nous passons ensemble ne se résume plus désormais qu’à quelques minutes avant qu’il ne s’éclipse. C’est comme si un mur invisible s’était érigé entre nous. Et puis…c’est là que j’ai compris. Il a fallu se rendre à l’évidence. Il me plait. Beaucoup même. Trop peut-être. La vérité c’est que…je n’ai eu de cesse de penser à lui. Depuis le premier jour, il est dans mes pensées et hante mes nuits. Quand je le vois, je ne suis plus moi. Je perds le contrôle et je dois avouer que ça m’effraie. J’ai peur de ce qu’il éveille en moi. De toute façon, ça n’a pas vraiment d’importance…j’ai moi-même pris de la distance. J’ai cessé d’aller l’importuner et me suis cantonnée à de simple bonjour et quelques sourires avant de fuir à mon tour. Voilà où j’en suis. C’est tout de même ironique de la part d’une personne qui s’était jurée de ne jamais s’attacher à qui que ce soit ?

Pour fêter le retour de l’ancienne Lilly, j’ai ressorti cette bonne robe rouge courte, très moulante et au décolleté très prononcé. Apparemment, elle fait l’unanimité auprès de la gente masculine, d’après Cassidy. Vous voulez mon avis ? j’me fiche des garçons. J’me fiche du concert. J’me fiche de tout ça. J’veux juste…le voir. Je sais qu'il travaille ce soir et aussi qu'il sera là. Je mords ma lèvre inférieure, puis arrange ma chevelure ondulée qui vient s’échouer sur mes épaules. Je presse lentement mes lèvres l’une sur l’autre pour étaler la beauté écarlate de mon rouge à lèvres et je finis par une touche parfumée avant de rejoindre les filles dans la voiture.

Arrivée sur la plage, la musique bat son plein. Mon regard parcourt le paysage nocturne aux mille et une couleurs. Les lumières sont magnifiques. Entre deux rayons orangés, je l’aperçois au loin. Mon cœur s’accélère. Tous ces angelins ce soir et pourtant, je ne vois que lui. Et puis, soudain, mon cœur se serre à la vue de ces pétasses qui se jettent à son cou tandis qu’il ne se montre ni hésitant ni réservé mais entreprenant : Je vois… murmurai-je amère. Cette affreuse sensation dans ma poitrine, pourquoi est-ce si douloureux ? je déglutis difficilement, probablement à cause de cette horrible boule au fond de ma gorge et mon dieu...cet abominable poids qui me noue l'estomac. Je prends une profonde inspiration afin de contenir ce qui me consume et me ronge de l'intérieur. Je mords l’intérieur de ma joue avec violence, serre vigoureusement les poings et mon regard de feu, aussitôt les maudit.

Les vibrations de la basse retentissent sous mes pieds et je peux aussi les sentir me transcender. Elle m’appelle, l’ancienne Lilly. Elle me susurre à l’oreille, elle m’incite à me perdre, à m’égarer, juste pour ce soir. Je mordille ma lèvre inférieure, hésite encore mais je cède finalement à ses supplications. Le regard soudain déterminé va se loger sur un énorme verre de Vodka orange dont je me saisis vivement sur un plateau d’un serveur qui passe. Sans plus attendre, je le porte à mes lèvres puis bois une bonne goulée, puis deux, puis trois et l’engloutis entièrement. Un deuxième passage ?  un deuxième verre descendu ! Ne dit-on pas jamais deux sans trois ? Mais d’abord ! sur la piste ! Je me mêle aux inconnus sur la plage, ferme les yeux et remue mon corps au gré de la musique, tantôt rapide, tantôt lente, tantôt sexy et sensuelle, sans réfléchir ni penser, juste…le bon plaisir de danser. De temps en temps, un corps se colle au mien, et qui que ce soit, je ne repousse pas, au contraire, je me laisse faire, subissant quelques attouchements dont je me fiche éperdument, car la seule chose qui me hante désormais c’est lui.

Il me faut un peu de temps pour comprendre que si certaines personnes m'abordent, ce soir, ce n'est pas réellement parce qu'elles se sentent mal. Mais consciencieux dans mon travail comme je le suis, je ne le réalise que lorsque l'une d'entre elles, plus entreprenante, me demande mon numéro de téléphone. J'arque les sourcils, incertain d'avoir compris la question, à cause des enceintes qui crachent de la musique, non loin de là. Je fronce les sourcils et me penche très légèrement pour tendre l'oreille et dans un gloussement visiblement conquis, la jeune fille m'indique son téléphone portable en renouvelant sa question. Je me racle la gorge et esquisse un sourire d'inconfort tout en déclinant fermement d'un hochement de tête négatif.

— Non. Le ton n'est pas sec mais ferme et ne laisse pas vraiment la possibilité de négocier. Je comprends que je ne sers plus vraiment à grand chose ici donc je commence à faire un tour d'horizon, cherchant mes collègues du regard, mes doigts venant effleurer la poignée du talkie-walkie.
Et c'est là que je crois te voir.
C'est difficile à dire, en réalité, avec tout ce monde, toutes ces lumières et surtout le fait que ça me semble difficile à croire qu'il s'agisse de toi. La fille qui tenait à avoir mon numéro semble me poser une autre question que je n'entends pas vraiment tant mon regard cherche à disséquer ce que je vois. J'abandonne cette dernière, annonçant que je dois retourner à mon poste, évoluant dans la foule sans quitter la silhouette en robe rouge, qui se déhanche sensuellement alors que certains s'attroupent autour d'elle pour obtenir ses faveurs.

Lilly ? Non, ça ne peut pas être toi. Ma Lilly n'aime pas ce genre de festivités. Je fronce les sourcils : qu'est-ce que je raconte ? Tu ne m'appartiens certainement pas. Simplement, j'ai l'impression de découvrir un portrait bien différent de celui que tu m'as brossé. Depuis Halloween, je n'ai pas vraiment cherché à m'exposer plus que ça : avoir surpris ce baiser entre toi et ce mec ne m'a pas vraiment encouragé à me montrer plus entreprenant. Au contraire, je me disais que j'avais probablement mal interprété tes signaux...
Et pourtant, impossible de te chasser de mes pensées quand mon esprit n'est pas occupé.
Mais si même au travail, tu trouves le moyen de...

Je m'arrête brusquement : à force de marcher dans la foule pour me rapprocher, sans la quitter des yeux, j'ai fini par entrer en collision avec une femme brune, qui profitait de la musique pour danser.

Spoiler:

Confus et hébété, je lâche la robe rouge des yeux pour me concentrer sur ses grands yeux bruns dans lesquels j'ai bien du mal à capter l'émotion dominante. Je m'excuse immédiatement, en me penchant vers elle pour que la musique ne couvre pas complètement ma voix :

— Je suis désolé, vous allez bien ?

J'essaye de résister à la tentation de chercher tout de suite des yeux l'objet de ma curiosité, m'assurant d'abord que la femme va bien. Je ne sais pas si c'est l'uniforme de secouriste ou bien mon nom et mon initiale - D. WHITMORE - brodés sur ma poche pectorale qui l'intrigue, mais quelque chose retient son attention ...

A Valentine’s concert

Lilly & members

«Chasser le mal par le mal»

Il arrive d'un coup, de nul part, comme, comme un lion affamé prêt à se jeter sur sa proie. Hardin. Il me dévore avec ce regard detestable, ce regard prédateur et incontrôlable puis m'attire tout contre lui, plonge son visage dans mon cou pour l'embrasser avidement. Ma reaction ne se fait pas attendre. Je suis sans doute saoule, mais je ne veux pas de ça ! Pas avec lui ! Non. Je le repousse violemment mais le message ne passe pas. Il ne semble pas comprendre. C'est pourtant clair non ? Et bien non. Car cet imbecile revient à la charge comme un taureau, sans aucune grâce. Il se jette sur moi comme un porc sur de vieux restes. Il parcourt de ses doigts prédateurs et intrusifs, mon corps réfractaire. Usant de sa force vigoureuse, il commet l'acte de trop en venant salement cramponner mes fesses. C'est épidermique. Je le repousse un peu plus fort avant de lui asséner la gifle du siècle, me blessant la main par la même occasion. Qu'est-ce que je fais là ? Qu'est ce qui m'a pris de venir ici ?

Je n'aime pas ces yeux. Hardin a cette expression masculine détestable de l'homme qui n'accepte pas qu'on puisse dire "non", sous les prétexte qu'il est la coqueluche du campus. D'abord choqué de mon geste, il me toise furieux. La peur s'empare brusquement de moi et mon coeur s'accélère. Je le vois serrer les poings puis les dents si fort que l'articulation de sa mâchoire remue sous sa colère. Il revient à la charge. Encore. Mais, je reussis à m'éclipser avant qu'il ne me rattrape. Je fuis. Le plus vite possible. Le plus loin possible, sans regarder oú je vais, le cœur lourd et affolé, les yeux brillants. Je m'extirpe de la foule transpirante et festive, puis viens me réfugier au bord de la mer. Je jette un regard derrière moi, paniquée et haletante. Heureusement, pas d'Hardin à l'horizon, juste le brouha estompé de la musique et le bruit des vagues qui s'échouent sur le sable humide. Je fais face à la mer puis éclate en sanglots avant d'être prise de vertiges, de vaciller et tomber sur le sol maléable. Peu m'importe la douleur de cette chute, elle n'est rien comparée à celle qui transperce mon cœur. Mes sanglots quant à eux ne s'estompent guère comme le bruit des vagues qui demeurent éternels.

interagi avec @Doyle Whitmore

Sanaa se laissait aller au son de la musique. Elle se vidait la tête en pensant au moment présent uniquement. Elle tentait de mettre au placard ses soucis et ses craintes, au moins pour un temps, la durée du concert. La danse et la musique avaient été bien souvent une échappatoire pour la demoiselle Keagan. C’était lorsqu’elle était plus jeune. Encore une enfant qui tentait de surmonter la perte de son père et l’abandon de sa mère. Une petite fille pleine de tristesse et d’incompréhension qui atténuait sa peine dans l’art. Elle le faisait à travers le dessin, la musique et la danse. Ces trois domaines avaient été sa bouée de sauvetage. Celle qui lui faisait du bien et lui permettait d’oublier ses soucis. C’était bien avant qu’elle ne connaisse les effets anesthésiant de l’alcool. Avant qu’elle ne soit prisonnière et dépendante de ce poison. Avec les années, la brunette avait laissé la danse et la musique de côté. Le dessin, elle n’avait jamais arrêté. Elle en avait même fait son métier en devenant styliste tout comme l’était son défunt père. Il était peut-être temps pour elle de se remettre à nouveau à la musique et/ou à la danse maintenant qu’elle avait énormément de temps où elle était seule avec elle-même.

La demoiselle Keagan n’avait pas fait attention aux gens qui l’entouraient jusqu’à qu’un jeune homme la heurta. Elle avait été l’espace d’un instant dans sa propre bulle et ça lui avait fait le plus grand bien. Le secouriste, à en juger par sa tenue, lui avait fait perdre légèrement l’équilibre, mais elle n’était pas tombée. Il s’arrêtait et il prenait le temps de s’excuser. Pour ce geste, Sanaa ne lui tiendrait pas rigueur de sa maladresse. « Je vais bien. Ce n’est rien. » Le regard de la brunette avait été attiré par le badge doré du jeune homme qui portait un nom qui lui semblait familier. Était-il l’un des frères dont Devon lui avait parlé ? Était-il celui qui lui causait tant de tourment ? Elle ne savait plus si Devon avait mentionné un prénom en particulier lors de leur conversation. Au fur et à mesure, la brunette mettait des visages sur les personnes dont son voisin lui avait parlé. Elle avait eu l’occasion de croiser un jour par hasard sa sœur à l’hôpital. Elle avait été très sympathique avec Sanaa. « Whitmore ? Désolé pour mon indiscrétion. Vous êtes parent avec Devon Whitmore ? Je suis... » La demoiselle Keagan ne savait pas exactement comme se présenter. Est-ce qu’elle était simplement sa voisine, son amie ou sa marraine avant les alcooliques anonymes, la fille qui tente de l’aider avec son addiction ? La brunette optait finalement pour le plus basique des termes. « ... Sa voisine. »

@Sanaa J. Keagan 

— Je vais bien. Ce n’est rien. m'affirme la femme brune que je viens de bousculer par mégarde, et j'en suis rassuré. C'est sans doute tout ce monde, combiné au bruit et à cette apparition, dans la foule, qui m'a rendu inattentif. Alors que je relâche légèrement mon attention, soulagé de ne pas l'avoir blessée malgré moi, je réalise qu'elle me dévisage après avoir longuement observé mon nom. Whitmore ?  

— Oui... ? dis-je en fronçant légèrement les sourcils, cherchant déjà dans ma mémoire si je devrais me souvenir ou non de ce visage mais il ne me dit absolument rien du tout.

— Désolée pour mon indiscrétion. Vous êtes parent avec Devon Whitmore ? Je suis... Elle semble chercher ce qui pourrait le mieux définir sa relation, du moins, c'est l'impression qu'elle donne quand elle conclut enfin : ... Sa voisine.

— Oh. est la seule réponse qui s'échappe de mes lèvres, sur le moment. Pourtant, mes lèvres s'étirent en un fin sourire en coin. J'acquiesce et me penche un peu vers elle pour lui répondre : C'est mon frère. Et puis, je ne sais pas trop pourquoi cette idée me traverse l'esprit, mais j'espère qu'elle n'entretient pas de mauvais rapports avec lui. Je fronce un sourcil circonspect en observant les expressions sur le visage de la femme en face de moi. Je ne pense pas. Devon a son humour bien à lui, une langue parfois trop pendue et un avis plutôt tranché sur beaucoup de choses. Mais je ne le vois pas se comporter comme un rustre avec son voisinage. Comme tout le monde, il a ses travers, mais je sais, depuis mon séjour à l'hôpital, qu'il a repris sa vie en main. Je me pince les lèvres, ne pouvant m'empêcher de regarder par-dessus l'épaule de la voisine de mon frère. Je crois percevoir de l'agitation dans ce bouillon de foule.

— Je m'appelle Doyle. dis-je, dans une nouvelle esquisse de sourire, pour ne pas paraître aussi froid que j'en ai l'air. Mon regard est de nouveau attiré par la foule, mon sourire s'effaçant en même temps que je constate que la silhouette en robe rouge semble repousser des avances non désirées. Excusez-moi, je dois... Un dernier regard, un peu confus, portant ma main à mon talkie pour signaler à mes collègues ainsi qu'aux responsables de la sécurité qu'il semble y avoir un conflit, dans la foule. Je salue la voisine de Devon, avant de l'abandonner : Passez une bonne soirée.

@Lilly P. Henstridge

Il me semble bien avoir vu ta main voler pour gifler ce type qui, au fur et à mesure que je m'approche, a des traits qui ne me sont pas inconnus. Je ne suis habituellement pas physionomiste, pourtant, lui, je pourrais difficilement l'oublier tant je suis encore hanté par le souvenir de ses lèvres contre les tiennes. Je pourrais presque ressentir une certaine satisfaction de le voir ainsi repoussé mais ma préoccupation pour toi est celle qui domine avant tout. Je ne vois pas son air furieux, parce que mes yeux te cherchent toi et te suivent pour ne pas te perdre. Il amorce un mouvement et tu te dérobes. As-tu seulement besoin de mon intervention ? Je ne prends pas la peine d'y réfléchir, mes jambes avancent d'elles-mêmes tandis que je me fraye un chemin jusqu'à toi, tantôt bousculé, tantôt frôlé. J'ai l'impression déroutante de plonger dans les eaux poisseuses du Styx pour te rattraper avant qu'il ne soit trop tard et que tu appartiennes définitivement à un Royaume où je ne suis plus rien.
Je m'extirpe de cette marée humaine qui normalement m'aurait probablement provoqué un malaise en d'autres circonstances et après un tour d'horizon sur la plage, je te vois, face à la mer. Difficile de te rater dans cette robe écarlate qui épouse au moins autant parfaitement tes formes qu'elle nie ta personnalité. Je m'approche prudemment, incapable de prononcer ton prénom, tant je suis sidéré de te voir à la fois si puissante et fragile. Ton corps est soudain secoué de spasmes et je comprends à ton langage corporel que ce sont des sanglots. Cette vision me vrille soudain le cœur, m'immobilisant un bref instant.
J'hésite, partagé entre le besoin de te consoler et la pudeur qui m'oblige à ne pas m'imposer... Mais soudain tu sembles vaciller et mon corps décide tout seul.

— Lilly ! dis-je, en te rattrapant, l'eau s'infiltrant déjà de manière désagréable dans mes chaussures d'intervention. Et pourtant, je n'y accorde aucune attention, mon regard préoccupé trop captivé par tes yeux embués de larmes. Je te tiens solidement contre moi comme jamais auparavant et m'écarte légèrement pour trouver ton regard, pour essayer de comprendre ce qui peut bien t'arriver. Je cherche, sans vraiment m'en rendre compte, une quelconque trace sur ton visage comme si je craignais que ce type ne t'ait fait du mal.

— Je te tiens, je suis là... dis-je, pour te rassurer, je crois et je réalise que chacun de tes sanglots semble me poignarder. Je déglutis, mon pouce osant à peine effleurer ta joue. Il... Il t'a fait du mal ?

A Valentine’s concert

Lilly & members

«Chasser le mal par le mal»

Je n'ai plus aucun contrôle de mon corps. Basculée dans le vide sous le poids de la fatigue, de la peur, du chagrin et de l'alcool, je me sens partir, aspirée par le pesanteur océanique: Lilly ! mon prénom qui résonne au loin comme un écho du passé, un rêve familier. Doyle ? Delestée du poids de mon corps, j'ai l'impression de flotter, retenue par  la chaleur bienfaitrice de ces bras qui m'empêchent de sombrer dans l'océan Venicien. Et pourtant, l'eau me couvre les genoux...

Je te tiens. Je suis là... Tu es là ? Doyle ? Je relève la tête, toute groggy quand mes yeux larmoyants trouvent les tiens. Je reste là, silencieuse, interdite et l'espace d'un instant, je crois rêver. Depuis quelques temps, tu hantes mes songes, tu tourmentes mes pensées, et desormais tu m'apparaîs ? Qu'est-ce qui m'arrive ?

Il...il t'as fait du mal ? ton pouce frôle délicatement ma joue. Tu...tu es là ? Il me faut un certain temps pour percuter que tu es là, que tu me tiens fermement dans tes bras et que tes yeux inquiets me transpercent. Je n'ai pas la force de parler. Tu es là...comme un oasis en plein désert, comme un ange tombé du ciel, comme la lumière au bout du tunnel. Tu es là...

La pensée de ce qu'il aurait pu m'arriver ce soir me noue l'estomac. Je te dévisage, fébrile sourire aux portes du désespoir qui se meurt dans le chagrin. Je bascule, la tête en avant pour venir m'écrouler dans tes bras. Mon visage vient aussitôt s'echouer au creux de ton cou tandis que j'enroule mes bras autour de ta taille et te serre si fort que je n'arrive plus à contenir toute cette torpeur. Mon corps se met alors à trembler de manière incontrôlée. Submergée, dévorée, consumée par toutes ces émotions negatives, j'explose. Un trop plein ? Sûrement. Une overdose ? Sans doute. Et puis ta présence salvatrice qui fait pencher la balance, m'emplit d'un tel soulagement que j'en courbe l'échine. Tes octaves ont balayé le silence. Au son des vagues qui s'echouent sur la plage, je me laisse aller. Au son de l'eau salée qui claque sur le sable humide, je pleure à chaudes larmes...comme jamais auparavant... de toutes mes forces...sans aucune retenue. Je suis totalement mise à nu.

Les minutes s’égrènent tandis que mes larmes ne cessent de s'écouler. Et puis de nouveau ce silence. Je recule seulement mon visage sans jamais rompre notre étreinte, suffisamment pour venir égarer mon regard dans le tien. Les secondes s’égrènent tandis que j'y cherche des réponses. Mes bras te libèrent et ma main glisse sur ta joue que du bout des doigt, je chérie d'une caresse: tu es là.. Pourquoi ? Dis-moi pourquoi tu es venu jusqu'ici ? Jusqu'à moi ?

Les yeux dans les yeux, je déglutis. Les yeux dans les yeux, je souris doucement. Les yeux dans les yeux, je rapproche à nouveau mon visage pour bifurquer sur ta joue et la chérir cette fois d'un baiser simplement pour...te remercier. Paupieres closes, je presse ma tempe contre la tienne et te murmure au creux de l'oreille: restes avec moi.