Jamais, je n’aurais pu être animateur radio. Être tous les matins face à des milliers de personnes qui vous écoutent m’aurait tétanisé. Je suis sûre qu’aucun mot ne serait sorti de ma bouche. Je n’en revenais toujours pas que Cordelia en soit l’une des vedettes. En quatre ans, elle avait changé. Elle n’avait pas menti et je le découvrais petit à petit. « C’est vrai que mes erreurs au travail ont plus de conséquences que les vôtres. » Kristian avait raison sur ce point. J’avais bel et bien la vie de personnes entre mes mains.

Kristian disait que son travail était facilité parce qu’il avait la bonne personne face à lui. Il parlait à coup sûr de Cordelia. De qui d’autre pouvait-il parler, c’est avec elle qu’il partage l’affiche. La façon dont il parlait d’elle, il avait l’air de vraiment l’apprécier. D’ailleurs comment ne pas l’aimer ? Ma sœur a toujours été une femme adorable et avec une immense générosité. « Vous avez l’air d’être attaché à elle ? Vous n’êtes pas simplement des collègues de travail, n’est-ce pas ? » C’est vrai que je pouvais avoir l’air très curieux, mais je suis sûre que c’est une question qu’on devait souvent lui poser. Est-ce qu’ils jouaient un rôle ? J’en doutais. Est-ce qu’ils étaient amis ou plus ? C’était lui la cause du divorce de Cordelia et Graham ? Avait-il que Graham n’avait pas ? Ou peut-être que c’était Graham qui avait eu un comportement ou des actes qui ne convenaient plus à Cordelia ? Je me demandais si un jour, ma sœur se confierait à moi sur sa séparation. Il avait aussi de fortes chances qu’elle me laisse dans l’ignorance. J’avais plus de chance d’avoir des réponses de la part de mon ex-beau-frère. Mais par respect pour Cordelia, je ne lui demanderais jamais. Lui aussi avait coupé les ponts avec moi en même temps que le reste de ma famille. Donc il était peu probablement que je renoue avec Graham. La proximité et la complicité de Cordelia et Kristian apparemment ne déranger personne. « C’est sûrement parce qu’aucune femme partage votre vie actuellement. » Y en sûrement plus d’une qui serait jalouse du duo qu’ils forment. J’étais ravie d’apprendre que ma sœur avait gardé sa simplicité. Mais Kristian se sentait obligé de la taquiner même quand elle était absente. « En général, quand on taquine autant une personne, une femme en particulier, c’est parce qu’on dissimule quelque chose. C’est comme quand on était gamin et qu’on embêtait une fille parce qu’elle nous plaisait. »

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Cordelia et Kristian avaient une excellente entende à l’antenne. Ils avaient une certaine complicité qui donnait envie. Pour ma part, elle me rendait nostalgique, voire jaloux. Elle me rappelait le lien que j’avais perdu avec ma sœur. J’avais presque l’impression qu’elle me remplaçait avec ce nouvel homme dans sa vie. Il me semblait qu’elle l’avait connu pendant la période où j’étais rentré en prison. Était-il devenu pour elle un frère de substitution ? Était ce à lui qu’elle faisait ses confiances après, qu’elle ait arrêté de me les faire ? « Ça se voit que vous êtes amis. Puis sans amitié, ça serait probablement compliqué de travailler depuis tant d’années ensemble. Un divorce ça ouvre des portes et l’une de ses portes est apparemment l’imagination. » Tout comme leurs auditeurs, je ne savais pas ce qui avait conduit Cordelia à divorcer de Graham. Moi aussi, je m’imaginais un tas de choses. Je ne voyais pas ma sœur avec un autre homme en étant mariée. Mais peut-être que je me trompais. Comme elle l’avait dit et je l’avais même constaté, sur certains aspects, Cordelia avait bel et bien changé.

Kristian disait faire la part des choses entre sa vie privée et sa vie personnelle. Il avait personne dans sa vie, mais apparemment même si ça avait été le cas, sa relation à la radio avec Cordelia n’impacterait pas son couple. Il insistait sur l’amitié qui les unissait en espérant que les mentalités changent. Malheureusement pour lui, ça ne sera probablement pas pour tout de suite. Kristian avait le besoin presque incontrôlable de taquiné en permanence sa collègue même quand elle était absente. Je me demandais donc si cette manie ne cachait pas autre chose. Je souris à la question de Kristian. « Je reconnais que je n’ai pas réellement d’amie féminine. » Mon passé m’avait fait perdre toutes mes amitiés et ce tout sexe confondu. Je n’avais pas encore eu le temps de me créer un nouveau cercle. Je n’avais que des connaissances dans ma vie. « Pas avec chacune d’elle. Mais avec certaines, je ne serais pas contre. Et c’est déjà arrivait avec quelques unes. »

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Kristian avait probablement raison, si son émission avec ma sœur fonctionne si bien, c’est peut-être bien grâce à l’authenticité de leur relation. J’étais heureux d’apprendre que ma sœur avait des personnes sur qui elle pouvait compter. Mais ça signifiait aussi qu’elle se passait aisément de moi et que j’allais avoir énormément de difficulté à récupérer une place dans sa vie. Elle me manquait tellement et je commençais à désespérer de ne pas pouvoir la récupérer un jour. « Et vous êtes souvent en désaccord. J’avoue que je suis un nouvel auditeur. Je ne suis pas en ville depuis très longtemps. » Il me semblait que l’émission était locale donc qu’elle était diffusée uniquement à Los Angeles et dans ses alentours. J’étais en prison en Floride donc beaucoup trop loin pour avoir la possibilité d’écouter la radio et on ne peut pas dire que j’avais un vrai accès à Internet.

J’avouais à Kristian qu’il y avait bien certaines de mes collègues avec qui j’aimerais coucher et que c’était déjà arrivé avec quelques-unes. « C’est un mythe. On n’a pas le temps de fricoter dans des placards. On a toujours énormément de travail aux urgences. En général, c’est après le travail. » Kristian avait l’impression que les médecins n’avaient pas de vie en dehors de l’hôpital. C’est vrai qu’on y passait beaucoup de temps, mais pour ma part, c’était un choix. Ce n’est pas comme si j’avais quelqu’un qui m’attendait à la maison ou comme si j’avais des amis ou de la famille avec qui passait du temps. Donc autant passer mon temps à être utile plutôt qu’à me morfondre sur ma minable vie comme la décrivait si bien ma petite sœur Lilly. « Oui, j’y passe beaucoup de temps. Je n’ai pas de vie de famille pour le moment. Je lèverais probablement le pied quand ça arrivera. Qu’est-ce qui vous amènes à l’hôpital ? » Il venait dire qu’il y passait du temps. Avait-il un problème de santé particulier ?

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Cordelia aimait contredire son binôme ce qui ne m’étonnait pas d’elle. Je la reconnaissais bien là. Puis quand elle pensait avoir raison, il fallait avoir énormément d’argument pour la faire changer d’avis. « Après, je crois que toutes les femmes aiment contredire les hommes. C’est leur passe-temps favori. » C’était bien connu non ? L’émission de radio était la seule chose qui me permettait d’avoir des nouvelles de ma sœur. C’était quand même dingue de se dire que ce mec en face de moi en savant bien plus que moi au sujet de Cordelia. Est-il son nouveau soutien ? Son nouveau confident ? Je me demandais si je devais lui dévoiler ma véritable identité, si ma sœur lui avait déjà parlé de moi ? Si je lui avouais que j’étais le frère de sa collègue, allait-il me rire au nez en me disant que sa fameuse Lux n’a pas de frère ? Peut-être qu’en dévoilant qui j’étais, il m’en dirait plus sur Cordelia ? Mais comment ma sœur le prendrait si je dévoilais mon existence alors qu’elle l’avait décidé de le cacher. Je ne pouvais pas prendre le risque de la contrarier davantage. J’allais donc rester un auditeur anonyme parmi d’autres qui apprécie l’émission.

Selon Kristian, je devais lever le pied si j’espérais avoir un jour une vie de famille. Oui, j’avais un métier assez épuisant que ce soit physique ou psychologique. Parfois, c'était compliqué, on avait des patients avec des vies pas simples ou on perdait des patients. Ce n’était pas simple à encaisser et ça plomber le moral. « Comme tout le monde après une journée de travailler. Supporter votre collègue doit aussi vous fatiguer à la fin de la soirée, non ? » Kristian n’allait pas souvent aux urgences. C’était une bonne chose, j’avais mal interprété sa phrase précédente ce qui était bien. « Il parait qu’on rencontre sa moitié en général sur son lieu de travail. Donc qui sait ? » Mais au fond de moi, je savais que j’avais déjà trouvé ma moitié, mais que je l’avais détruite et perdue pour toujours. Jamais, Moïra ne me pardonnerait ce que je lui avais fait. Elle avait d’ailleurs raison et elle serait complètement folle de m’accorder une nouvelle chance. Je ne le mériterais pas et elle valait beaucoup mieux que moi.

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La recette de la réussite de Kristian et Lux était apparemment, leur complicité et son inverse leur mésentente. Un savant mélange qui sans doute leur convenait et que leurs auditeurs appréciaient. J’en apprenais un peu plus sur ma sœur. Je ne l’aurais jamais imaginé comme animatrice radio. Elle avait l’air de s’épanouir et de s’amuser dans ce domaine. J’étais heureux pour elle. J’aurais simplement préféré en parler directement avec elle plutôt qu’avec son collègue. « Ça devrait être intéressant pour les auditeurs d’entendre une amitié se créer au fil des émissions. » C’était un peu comme une série télévisée qu’on attendait avec impatience et où on attend les rebondissements. Certains ont dû être déçus d’apprendre, que Cordelia était mariée, donc pas d’approfondissement possible avec Kristian. Mais comme il le disait précédemment, le divorce de Lux avait éveillé de nouvelles histoires.

Après une journée de boulot, j’étais crevé. Je n’étais probablement pas seul dans ce cas. Je supposais que c’était de même pour Kristian. Il disait que non parce que Lux ne le suivait pas chez lui. Moi, je pouvais dire que ce n’était pas difficile de vivre avec Cordelia. Je l’avais fait pendant des années. Ma sœur était vraiment adorable enfin tant qu’on ne lui faisait pas du mal. On disait qu’on rencontrait souvent sa moitié au boulot. Ça pouvait être le cas pour Kristian. Apparemment, il rencontrait du monde là-bas. « Du coup, vous avez l’embarras du choix. »

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