'Malheureusement, les chiffres s'alourdissent d'heure en heure alors que les secours continue de fouiller les décombres de ce qui fut jadis le plus grand centre commercial de Los Angeles'

Les images du chaos qu'avait provoqué l'explosion du centre commercial tournaient en boucle sur les chaînes de télévision. Les journalistes ne parlaient que de ça, comme si plus rien à côté n’avait d’importance, comme si le temps s’était arrêté à 11h30 ce matin. Et c’est ce que tous les habitants de Los Angeles devaient probablement penser. Mais ce n’était pas l’effondrement du centre commercial qui heurtait les gens, mais toutes les personnes blessée, toutes les familles meurtris par la perte d’un être qui leur était cher. Parce que oui, Los Angeles allait connaître des jours sombres.

Lorsque ça s’était passé, j’étais en train finir mon jogging dans le parc national de Los Angeles. J’avais entendu le bruit de l’explosion, mais à ce moment-là, je ne savais pas ce qu’il en était, je n’avais pas conscience qu’il s’agissait de cela, alors je n’y avais pas prêté une grande attention. C’est en reprenant la route de la maison que j’avais commencé à réaliser que quelque chose, c’était passé. Il y avait tout un remue-ménage dans les rues de Los angeles. Les sirènes ne cessaient de résonner et les camions de pompiers, les ambulances, les voitures de police défilaient les uns après les autres. C’est en rentrant à la maison et en allumant la télévision que je compris la réalité de la chose. Pendant un long instant, je m’étais figé pour regarder les images défiler sous mes yeux, J’étais resté sous le choc pendant de longues minutes avant de reprendre le dessus sur mes émotions. Je savais que des personnes que je connaissais étaient susceptible d’être à l’intérieur du centre commercial et j’espérais sincèrement qu’elle s’en sortirait indemne.

Ma première pensé était pour Seth. Il n’était pas à la maison et j’ignorais quel était son programme de la journée. J’avais alors pris mon téléphone, mais mes appels étaient longtemps rester sans réponse. Je ne savais pas si c’est parce que le réseau était saturé ou s'il n’était pas en capacité de me répondre, mais cette situation n’avait fait qu’exacerber mon angoisse heure après heure. Ce n’est qu’en milieu d’après-midi que j’eus de ses nouvelles dans un message où il m’informait que oui, il était sur les lieux de l’incident, mais qu’il n’avait rien de grave. Il n’avait que quelques petites blessures sans conséquence, mais que c’était moins vrai pour Ellen, Sanaa ou encore Jaimie. Ils avaient été tous les trois blessés, mais leur vie n’était plus en danger. En réponse, je lui avais proposé de le rejoindre, mais il m’avait dit de rester à la maison au calme, loin de tout le capharnaüm de l’hôpital.

C’est en début de soirée que j’entendis la porte d’entrée s’ouvrir. Je me levais précipitamment du canapé abandonnant mes occupations pour me diriger jusqu’à l’entrée de la maison. Lorsque je me retrouvais face à Seth, je me stoppais net, l’observant en long en large et en travers pour m’assurer que tout allait bien pour lui. Mon regard fini par se plonger dans le siens. Il semblait exténuer, éprouver par cette journée et je ne doutais pas une seconde que s’est ce qu’il devait ressentir. Je m’avançais alors vers lui jusqu’à être assez près de lui pour l’enlacer fortement durant un long moment. "Dis-moi que tu vas bien."

Après des heures et des heures d'attente sans le moindre signe de vie, il était enfin là. Je l'observais en silence, l'analysant à distance, espérant ne rien découvrir d'effroyable. Mes la distance devenait vite une souffrance et je me lançais de tout mon être jusque dans ses bras. Je pouvais sentir sa chair sous mes mains, son parfum acre. Un mélange de fumé et une odeur aseptisante comme celle de l'hôpital. Mais il était bien là, en chair et en os. Vivant ! 'Ne t'en fais' me dis-il, comme si c'était si facile. J'avais cru mourir pendant des heures en ignorant tout jusqu'au simple fait d'où il se trouvait Et, je serais probablement morte de chagrin si la réponse à cette question avait été qu'il était mort dans cette explosion, littéralement. Alors, non, je ne pouvais pas 'ne pas m'en faire' et il ne pouvait pas me demander cela. Encore moins en le voyant dans cet état, encore moins maintenant que je savais... que je savais qu'il y était... que je savais qu'il avait failli y perdre la vie.

Pourtant, je ne lui fis pas l'affront de le lui faire remarquer. Pour l'heure, il n'avait pas besoin que je lui fasse un sermon. Je profitais simplement de son accolade. Une accolade qui me sembla bien trop courte, mais ça non plus, je ne pouvais pas le lui repprocher. Et pourtant, dieu sait que j'aurais aimé lui hurler dessus. Ca n'aurait rien changé à la situation, ça n'aurait rien apporté de positif, si ce n'est me soulager de toute cette terreur que j'avais en moi. Mais, encore une fois, je n'avais pas le droit, pas après ce qu'il avait vécu.

Je le laissais, sans broncher, prendre de la distance, alors qu'il s'excusait de ne pas avoir donner de nouvelle, tout en m'en expliquant la raison. Je ne cessais de le regarder dans les yeux, mais aucun mot ne semblait vouloir sortir de ma bouche. J'avais un noeud dans la gorge, une boule atroce dans mon vente et en guise de réponse, je ne pus que lui offrir un hochement de tête. Puis, je sentis sa main glisser au creux de la mienne et alors qu'il nous dirigeait vers le salon, mes larmes coulèrent silencieusement le long de mes pomettes. Il ne le voyait pas parce qu'il m'avait devancé, mais, elles étaient bien là, brouillant ma vue à chaque nouveau pas que je faisais.

Il s'installa sur le canapé et je restais debout. Je tentais de lui cacher l'état dans lequel je me trouvais. Je devais me resaisir avant qu'il ne s'apperçoivent que je n'allais pas bien. Pas bien du tout. Mais alors qu'il m'interrogea sur ce que les journaux téléviser pouvaient racconter sur la catastrophe qui venait de toucher notre ville, je me sentis défaillir. Je laissais échapper des sanglots étouffés. Une main portée à ma bouche, l'autre à l'emplacement même où se trouvait mon coeur. Ma respiration se fit plus difficile, plus saccadée et je sentais peu à peu mon corps vacillé. Je me laissais finalement tomber au pied du canapé. "Je suis désolé" réussis-je a articuler non sans mal.    

Je sais que je n'aurais pas dû réagir avec autant d'intensité. Seth était là devant moi, blessé, mais sain et sauf. J'aurais dû me réjouir, souffler un bon coup et profiter de son retour à la maison. Mais je ne pouvais m'absoudre à passer à autre chose. J'avais à présent la confirmation qu'il aurait pu y rester et je n'arrivais pas à me sortir ça de la tête. Je m'excusais auprès de lui, mais je voyais bien qu'il ne comprenait pas, qu'il était surpris de me voir réagir ainsi. Il partagea avec moi des mots rassurants, mais ce dont j'avais le plus besoin, il me le donna, l'instant d'après, en m'enlaçant. Je passais mes bras autour de sa taille en faisant attention à ne pas lui faire de mal, puis ma tête se posa contre son épaule. "J'ai eu tellement peur." Je refoulais un sanglot avant de redresser mon visage pour le regarder dans les yeux. "Je sais que je surréagis sûrement. Mais tu es tout ce que j'ai de plus précieux et j'ai passé la journée a m'imaginer des histoires aussi pire les unes que les autres. J'ai juste besoin de m'assurer que tu es bien là et que tu vas bien." C'était probablement bête, mais j'avais besoin de me sentir rassuré. Je me reculais finalement, libérant mon frère de l'emprise de mes bras et soufflait tout en essayant d'esquisser un sourire. "Aller, on ferait mieux de s'asseoir. Tu dois être épuisé et je ne t'aide pas vraiment en me comportant comme une gamine effrayée." J'attrapais sa main et je l'invitais à me suivre jusqu'au canapé.

Seth s'excusa pour la frayeur que j'avais ressentie en son absence, mais à vrai dire, il n'avait rien à se reprocher de tout ça. À l'abord du Centre commercial, cela devait être le chaos à en croire les images qui circulaient sur toutes les chaînes de télévision, alors il était évident que sa première réaction ne serait pas de m'appeler pour me rassurer, même moi, je n'avais pas cru à une explosion de cette ampleur avant d'avoir allumé les écrans. En plus de ça, il avait perdu son téléphone, probablement dans le centre commercial dans la panique de l'explosion. "Ce n'est rien, ne t'inquiète pas pour moi. Le principal, c'est que tu sois sain et sauf."

J'étais étonnamment surprise du calme et du sang-froid dont faisait preuve mon frère, osant un peu d'humour pour faire redescendre la pression. En présence de quelqu'un d'autre, j'aurais sûrement été agacé, mais quand il s'agissait de mon frère, j'étais prête à tout lui accorder dans les bons comme les pires moments.

On s'installa sur le canapé et Seth me fit par de l'inquiétude que lui aussi avait eu à mon sujet. "J'étais au parc quand c'est arrivé. Bien loin de tout ce chaos, je n'ai même pas compris ce qui se passait sur le coup. C'est en rentrant à la maison que j'ai finalement compris. Tu devais déjà avoir perdu ton téléphone ou alors le réseau était saturé parce que je n'ai pas réussi à te joindre. Est-ce que tu sais si des amis, des proches y étaient ?" Sur le coup, je n'avais pas réellement pensé aux personnes qui pouvaient y être, mais maintenant que j'avais les idées un peu plus clair, ça me percutait. Seth n'était pas seul sur place et il était fort probable que des amis à lui ou même des proches à moi y ait été et mon cœur se serra de nouveau.